madeleine borgomano

Adhérente de l’Association dès l’origine et rédactrice en chef des Cahiers J.M.G. Le Clézio, notre amie Madeleine Borgomano nous a quittés brutalement le 10 novembre 2009.

Ceux qui ont eu la chance de la côtoyer au cours des journées Le Clézio, à Nice ou à Vannes, ont pu apprécier sa douceur, son attention aux autres, sa générosité ; sa force aussi. Nous avons tous en mémoire sa communication brillante et passionnée lors de la table ronde sur la Bretagne de Le Clézio à la bibliothèque de Port-Louis, en mai dernier.

Universitaire de renommée internationale, travailleuse acharnée (à la veille de sa mort, elle commençait son troisième livre sur Ahmadou Kourouma), elle a remarquablement servi la littérature en général et les auteurs auxquels elle s’est intéressée en particulier. Elle laisse une œuvre critique de première importance sur Marguerite Duras, dont elle était la grande spécialiste, présidente de la Société Marguerite Duras, surAhmadou Kourouma auquel elle a consacré deux études (Ahmadou Kourouma, le Guerrier griot, L’Harmattan, 1998 et Des hommes ou des bêtes. Lecture de « En attendant le vote des bêtes sauvages », L’Harmattan 2000). Pionnière, elle a également promu la littérature des femmes africaines en pays francophone dans son ouvrage : Voix et visages de femmes dans les livres écrits par des femmes en Afrique francophone (CEDA, 1989).

Mais nous connaissions surtout ses essais sur Désert et sur Onitsha, ses nombreux articles (cf. la rubrique bibliographie critique) sur l’œuvre de Le Clézio, qui frappent par la rigueur et la subtilité des analyses, la profondeur de la pensée, et surtout par la clarté et la densité d’une écriture ennemie de l’emphase. Consciente qu’« une interprétation close et totalitaire [serait] bien peu satisfaisante pour qui pense, avec Le Clézio, que ‘la littérature est un des derniers lieux d’incertitude, un espace où rien n’est affirmé’ i, Madeleine Borgomano a mis sa finesse, son érudition et son sens des nuances au service d’une oeuvre plus complexe qu’il y paraît.

Pour son amour de la vie, de la littérature et sa haute exigence, elle reste pour nous un modèle.

  1. « Nice et son haut-pays », in À propos de Nice, Les Cahiers J.-M.G. Le Clézio n°1, Isabelle Roussel-Gillet, Marina Salles (coord.), Paris, Éditions Complicités, 2008